Tito Honegger L'éloge du mouvement
Par Claude-Hubert Tatot
Tito Honegger dessine et sculpte. Elle cultive la forme jusqu'à l'épure et modèle l'encre typographique jusqu'au foisonnement. Ses sculptures sont légères, ses monotypes denses. Tito Honegger convoque en
permanence l'homme et la nature, elle leur emprunte des structures et des formes qu'elle interprète et épure. Pareils aux végétaux taillés, repiqués, greffés et bouturés, les oeuvres se
métamorphosent lentement d'une série à l'autre. Après de grands totems, sortes de corps-tronc d'où partent des bras-branches qui se dressent ou se déploient dans l'espace, Tito Honegger
avec ses dernières sculptures aborde plus franchement la figure humaine.
Deux tiges pour les jambes, une troisième pour le buste, de fines articulations, une peau très blanche au grain aussi fin que la poussière, ces grands échalas sont exagérément effilés et maigres, coiffés d'une
boule qui leur sert de tête, ils sont élégants et graciles. Ces étranges personnages tuteurs sont arrêtés dans leurs mouvements et ancrés au sol par des plots. Les jambes écartées, ils sont tendus vers l'avant et
désirent encore marcher à grandes enjambées en oscillant comme des girafes. De passage, ces marcheurs immobiles n'ont rien de figé. Libérés de leurs socles, ils iraient de l'avant pour conserver leur
équilibre, incapables de s'arrêter tant le mouvement est inscrit dans leur morphologie. Tito Honegger capte encore le mouvement, celui de l'eau dans de grands
monotypes. Des cailloux ronds et polis sont charriés de place en place, de feuilles en feuilles, par une eau noire qui s'éclabousse de reflets gris argenté et
de bouillons blancs. Pour obtenir ces effets Tito Honegger étale de l'encre typographique sur une plaque de verre. La matière est façonnée au rouleau et
au doigt, griffée, allégée et enrichie de touches claires et de valeurs sombres, avant d'être imprimée sur de grandes feuilles de papier de soie ou japon. Cette
technique par enlèvement et ajout est analogue au modelage. Ce travail ne pourrait pas se faire directement sur le papier, son extrême fragilité ne
supporterait pas ces opérations complexes sans être saturé, sans se froisser ni se déchirer. Mais par l'impression, il peut en recueillir et en présenter le
résultat. La finesse de la feuille contraste alors avec la richesse des variations de matières. Le corps, la tête, la peau, la plante, l'arbre, le bourgeon sont
constamment présents dans l'oeuvre de Tito Honegger. Cette alliance de l'homme et de la nature évoque le jardin qui apparaît souvent comme motif mais qui constitue surtout la métaphore du travail tout entier. Ils ont en
commun le retournement - celui de la terre cultivée et celui de l'image imprimée - et la lente préparation, en profondeur, aussi invisible que nécessaire pour que la surface s'anime. Tito Honegger Monotypes-sculptures Galerie Foëx 1 rue de l'Evêché - 1204 Genève Vernissage mercredi 7 mars 2001-02-22 expo jusqu'au 21 avril
mardi-vendredi de 14h30 à 18h30 samedi de 13h00 à 17h00 |